Reliefs bas, horizons vastes et escarpements cachés : la Haute Sarthe, territoire aux formes surprenantes

08/07/2025

Quand la terre se soulève : les buttes du Haut Maine

Peu de promeneurs le savent, mais le pays offre des élévations inattendues qu’on appelle ici « buttes ». Ces monticules, vestiges d’un passé géologique mouvementé, racontent mieux que bien des discours cette région « entre deux » — ni Maine, ni Normandie, mais tout à la fois.

  • La Butte de Tante Jeanne, culminant à 208 m, offre un remarquable point de vue sur toute la vallée de la Sarthe, aux environs de Vivoin. Surnommée parfois « la sentinelle du Perche », elle se remarque de loin et fait la fierté locale (Source : IGN, cartes de reliefs 1/25000).
  • La Butte Saint-Ouen, au nord de Beaumont-sur-Sarthe, dépasse elle aussi les 200 mètres. C’est ici qu’on découvre, au petit matin, les nappes de brume qui s’étirent paresseusement jusqu’à la rivière.

Ces buttes sont issues de la formation du Massif armoricain, vieux de plusieurs centaines de millions d’années. Elles marquent la transition entre le bas Maine et le pré-Bocage normand. Leurs sols, souvent pauvres, sont propices aux landes ou à la forêt : la lande de la Butte de Ballon, par exemple, abrite une flore rare en Sarthe (Source : Conservatoire botanique national de Brest).

La vallée de la Sarthe : méandres, coteaux et falaises silencieuses

Le trait d’union du pays, c’est évidemment la Sarthe. Mais saviez-vous que sur moins de 50 km, la rivière et ses affluents ont façonné des reliefs variés ? Entre Alençon et Le Mans, le paysage se déploie en trois grands types :

  1. Les plaines alluviales et marais riverains : plats, mais jamais monotones. Près de Fresnay, Saint-Christophe-du-Jambet ou Douillet-le-Joly, on croise les prairies inondables (certaines inondées jusqu’à 15 jours par an ! — Source : Bassin versant Sarthe-Amont), véritables carnets vivants pour les oiseaux de passage.
  2. Les coteaux et falaises calcaires : à Beaumont-sur-Sarthe ou Maresché, la rivière a grignoté les talus, faisant apparaître d’improbables falaises (jusqu’à 18 mètres de haut pour la plus célèbre, dite « La Roche »). Les cavités qui s’y lovent furent parfois habitées : on raconte qu’un trésor de chouans demeure introuvable, tapi sous une grotte oubliée…
  3. Les plateaux agricoles : de part et d’autre de la vallée, les terres ondulent, passant en douceur du vert pâturé aux blés dorés, mais n’allez pas croire à une monotonie de tableau : chaque bosquet, chaque haie, épouse le rythme antique du terrain.

On notera que cette alternance de reliefs constitue un corridor écologique majeur, aussi bien pour la loutre d’Europe revenue récemment qu’un cortège de chauves-souris et de libellules rares (Source : Sarthe Nature Environnement).

Le pays du bocage : haies, talus et les délices du relief ordinaire

Parmi les reliefs les moins spectaculaires mais les plus précieux du pays : le bocage. Ici, les haies n’ont pas été tirées au cordeau, et c’est heureux.

  • Les talus bocagers, parfois âgés de plusieurs siècles, forment une mosaïque de micro-reliefs. Certains dépassent les 2 mètres de haut. Ces obstacles naturels protègent les cultures du vent du nord et abritent jusqu’à 120 espèces végétales sur quelques mètres linéaires (Source : Observatoire national du bocage).
  • Le creux des hâtes ou petits chemins d’exploitants, témoins du passage des charrettes et des siècles. Marcher dans ces creux, c’est « lire » en creux le terroir, et parfois, y dénicher un peu d’histoire oubliée : un vieux puits, une borne moussue, un abri de berger.

Le bocage de Haute Sarthe, sauvé des remembrements excessifs, est devenu un atout pour la biodiversité. Entre Oisseau-le-Petit, Tuffé et Saint-Aubin-de-Locquenay, on rencontre encore ce patchwork de haies et de crêtes, vestiges du relief rural façonné par la main de l’homme (Source : CAUE de la Sarthe).

Les forêts, entre cascades de feuillus et lignes de crêtes

Impossible, en Haute Sarthe, d’ignorer l’empreinte forestière. Les forêts de Perseigne (5 114 ha, la plus vaste du département — Source : ONF), de Sillé-le-Guillaume et de Mézières-sur-Ponthouin occupent les plateaux et les pentes les plus marquées :

  • Perseigne culmine à 340 m à sa lisière nord, ce qui en fait un « point haut » régional, modeste à l’échelle nationale mais roide sous les mollets des randonneurs.
  • Les buttes boisées servent souvent de refuge aux cervidés, et les vieux tronçons forestiers cachent parfois d’anciennes motte castrales, vestiges des premières fortifications médiévales (ex : motte de Neuville-en-Champagne, source : Service Patrimoine Sarthe).
  • Les « fossés » forestiers, ouvrages creusés pour la chasse ou la gestion du gibier, ponctuent discrètement le relief, devenant lieux d’aventure pour les enfants et de cueillette pour les amateurs de cèpes.

La balade sur la ligne de crête, quand Perseigne verse doucement vers la plaine de Mamers, offre des panoramas qui valent bien plus qu’une carte postale. À l’automne, le relief se teinte de cuivres et d’ors, et on comprend alors pourquoi tant de promeneurs y cherchent l’inspiration.

Curiosités géologiques et micro-reliefs étonnants

Derrière une apparente simplicité, la Haute Sarthe cache des curiosités :

  • Le « Rocher de l’Arche » à Fresnay-sur-Sarthe : étrange arche naturelle, vestige d’une ancienne faille. Ce chaos de pierres granitiques intrigue les géologues et les enfants, persuadés qu’un géant s’est assis là.
  • La « Grotte du Tertre-Ganne » à Saint-Léonard-des-Bois : sculpture naturelle dans la falaises surplombant la Sarthe, où l’on racontait que les chouans cachèrent jadis des armes…
  • Vieux saguins, têtes de sources, mares perchées sur les plateaux : chaque village possède son détail de relief singulier, parfois mentionné dans les cadastres napoléoniens.

Les terres d’alluvions, moins connues que les buttes ou les forêts, sont à l’origine d’une biodiversité foisonnante. Plus de 400 espèces végétales inventoriées autour du marais de Vivoin-Tennie, rendu célèbre pour ses orchidées sauvages (Source : Fédération Nationale des Conservatoires d’Espaces Naturels).

Le relief comme patrimoine invisible : anecdotes et regards croisés

Derrière ces chiffres et ces faits, le relief est aussi une affaire d’imaginaire. Voici ce que racontent les anciens :

  • On dit qu’un orage, en 1830, fit s’effondrer le sommet de la butte de Montreuil-le-Chétif, changeant (un peu) le tracé de la route, et offrant aux écoliers un nouveau terrain de glissades boueuses.
  • Chaque crête ou bosquet a son « mont » ou « piton », carestitant parfois des noms aux sonorités patoisantes : le « Mauvais Pas », les « Rochers de la Demoiselle », la « Garenne du Coq »…
  • Les tremblements de terre, très rares mais bel et bien répertoriés (franceseisme.fr), sont cités dans les archives du Pays de Sillé (secousse en 1908, d’intensité IV, ressentie sur tout le Saulnois).

Ainsi, regarder le relief, c’est lire dans un livre dont on tournerait chaque page au rythme des saisons, où chaque herbe haute ou chaque sentier creux révèle, à l’usure, un pan de notre histoire rurale.

Pistes pour prolonger : marcher, rouler, observer

Pour ceux qui voudraient tester « en vrai » ces reliefs de Haute Sarthe, quelques idées :

  • Le sentier des Buttes de Ballon : circuit pédestre (8 km) sur sentiers balisés, avec tables d’orientation. Parfait pour saisir toute l’ampleur de la région vue d’en haut.
  • La Voie Verte Alençon-Le Mans : traversée douce entre plaine et vallons, idéale à vélo (infos : Pays de la Haute Sarthe Tourisme).
  • Sorties ornithologiques autour des marais de Vivoin ou du Bois de Chemiré : pour découvrir comment relief et faune s’entrelacent, balade animée par la LPO locale (LPO Sarthe).

Loin d’être une simple ligne sur une carte, les reliefs de Haute Sarthe façonnent les paysages, inspirent les arts et racontent, à qui veut bien tendre l’oreille, mille vies ordinaires et extraordinaires à la fois. On y marche pour le plaisir ou la méditation, on s’y perd parfois, mais on y revient toujours – ne serait-ce que pour découvrir, lors d’une promenade imprévue, un point de vue secret, un promontoire oublié, une courbe du bocage où la lumière s’amuse.

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