Échappées au fil de l’eau : Les rivières qui dessinent les Pays de la Haute Sarthe

La carte postale en chef : la Sarthe elle-même

Difficile d’ouvrir la question sans rendre hommage à la grande dame du coin : la Sarthe. C’est elle qui a donné son nom au département, mais aussi à ce territoire des Pays de la Haute Sarthe, qu’elle traverse du nord-ouest au sud-est.

• Source : La Sarthe prend naissance dans l’Orne, au cœur du Perche, dans le village qui porte fièrement son nom : Saint-Aquilin-de-Corbion.
• Longueur totale : 313 kilomètres — pas mal pour une rivière ! Source : Banque Hydro France.
• Parcours local : Elle entre dans le département au niveau d’Alençon et serpente ensuite en direction du Mans, en arrosant les principales localités de la Haute Sarthe : Oisseau-le-Petit, Fresnay-sur-Sarthe, Montbizot, puis Beaumont-sur-Sarthe, véritable “capitale fluviale” du coin.
• Particularité : Large, majestueuse dans ses méandres, elle porte encore par endroits les traces des anciens moulins et des gués d’autrefois. Sur ses rives se sont développés des bourgs commerçants, mais aussi une foule d’espaces naturels classés pour la richesse de leur biodiversité (zone Natura 2000 notamment à Montbizot).

La Sarthe n’a jamais eu la célébrité de la Loire, mais ici, c’est elle la star. Elle arrose, rassemble, inspire, et alimente secretions et veillées.

Les affluents qui n’ont rien de secondaires

Le territoire serait bien triste si la Sarthe coulait seule. Pourtant, c’est tout un peuple de rivières et de rus qui dialoguent, se croisent et se gorgent dans ses bras. Voici les principaux affluents et compagnons de route des Pays de la Haute Sarthe :

1. La Vaudelle

• Source : Elle naît dans les bocages de Villaines-la-Carelle.
• Longueur : Environ 25 kilomètres à vol d’oiseau, avec un tracé tortueux et discret.
• Parcours : Furtive mais persistante, la Vaudelle file sur les communes de Fyé, Neuville-sur-Sarthe et termine sa course à Saint-Marceau où elle se jette dans la Sarthe.
• Spécificités : Véritable refuge pour la loutre et les martins-pêcheurs, elle a servi pendant des siècles à irriguer les petites prairies alluviales de la vallée.

2. L’Orthe — Le compagnon du bocage

• Source : A quelques encablures du Bourg-le-Roi, à l’orée de l’ancienne forêt domaniale.
• Longueur : Près de 20 kilomètres.
• Parcours : Elle traverse notamment Piacé et le charmant village d’Assé-le-Boisne — commune qui ne serait sans doute pas la même sans cette veine d’eau !
• Usage : Jadis utilisée pour le rouissage du lin et du chanvre, activité qui fit la fierté et la prospérité de la région jusqu’à la fin du XIXe siècle (source : Archives départementales de la Sarthe).

3. La Merdereau (ou Merderet)

• Source : À la sortie du petit hameau de Maresché.
• Longueur : 32 kilomètres.
• Parcours : Elle longe Beaumont-sur-Sarthe, fertilise champs d’orge et prés humides, puis finit sa course dans la Sarthe à la hauteur de Vivoin.
• À savoir : Son nom, peu engageant pour certains, renvoie pourtant à l’ancien français “merdier”, signifiant marécage. Rien à voir avec un quelconque manque d’élégance !

4. L’Orne Saosnoise

• Source : Entre Thoiré-sous-Contensor et Grandchamp.
• Longueur : 30 kilomètres environ.
• Particularité : Elle serpente sous les châteaux, nappe les prairies, puis se jette, non dans la Sarthe, mais dans la Brèves à Mamers… qui, elle-même, rejoint la Sarthe à Conlie. Un labyrinthe à la française !

5. Le Sarthon

• Source : À Ancinnes, village en lisière du massif forestier d’Écouves.
• Longueur : 50 kilomètres.
• Parcours : Le Sarthon rejoint la Sarthe après Alençon. Elle arrose les prairies de Saint-Paul-le-Gaultier, utilisées volontiers pour l’accueil estival des chevaux percherons (source : Tourisme Orne).

Petits cours d’eau, grands enjeux

Sortons la loupe sur des “petits bras” dont on ne parle pas toujours. Ils ont pourtant leur charme… et leur utilité.

Les ruisseaux de la Haute Sarthe

• Le Ruisseau de l’Hermitière : Traverse Ségrie puis s’effile entre les peupliers, refuge privilégié des libellules.
• Le Vivier : Un micro-cours d’eau qui irrigue les anciennes terres maraîchères de Montreuil-le-Chétif.
• La Glaise : Née dans les bois de Vernie, elle a longtemps fourni de quoi mouiller les pieds des lavandières.

Nombre de ces cours d’eau alimentent (encore aujourd’hui) les zones humides classées — réserves pour la biodiversité, précieuses contre les sécheresses. Selon l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne, plus de 120 hectares de prairies inondables persistent dans la seule vallée de la Sarthe dans le secteur, abritant des espèces protégées comme le cresson sauvage ou la couleuvre à collier.

Au fil des villages, les rivières façonnent l’histoire

Les rivières ne sont pas de simples décors. Elles ont sculpté la vie, le travail, l’économie et même la sociabilité locale.

• Aperçus historiques : À Fresnay-sur-Sarthe, on recense 8 anciens moulins à eau le long de la Sarthe au XVIIIe siècle. Les pierres sont encore visibles au détour d’un sentier, en particulier à Saint-Léonard-des-Bois, où les ruines mêlent poésie et mousse.
• Légendes locales : Plusieurs affluents (notamment la Vaudelle) ont leur lot de croyances : on dit qu’un “chien sans tête” y hanterait les nuits de brouillard, rappelant au passage qu’il valait mieux autrefois éviter ces berges quand le village sonnait minuit.
• Manifestations conviviales : Chaque année à Beaumont-sur-Sarthe, la “Fête de la Rivière” attire curieux et amoureux d’espaces verts pour découvrir à la fois faune aquatique, patrimoine bâti et traditions fluviales.

Quand l’eau fait débat

Les crues marquent aussi l’actualité : lors de la grande crue de 1966, la Sarthe a submergé les prés de Vivoin et de Maresché, forçant à goûter aux joies de la solidarité et des bottes de caoutchouc. Aujourd’hui, la gestion des eaux reste un enjeu : lutte contre les pesticides, restauration de la ripisylve, et un nouveau plan “Rivières propres” mené par la Communauté de communes Haute Sarthe Alpes Mancelles (source : CC Haute Sarthe Alpes Mancelles).

Carte de visite : panorama des rivières de Haute Sarthe

Vivre le territoire dans le creux de l’eau

Voilà, les rivières ne se contentent pas de traverser les Pays de la Haute Sarthe, elles les dessinent, les relient, et leur donnent ce charme un peu secret, ce parfum de brume qui fait revenir les promeneurs et s’installer les nouveaux venus. Il ne reste qu’à enfiler une paire de bottes, ou à sortir le vélo, pour découvrir ces cours d’eau — de préférence par une matinée où la Sarthe fume encore sous la rosée. Ceux qui prennent le temps de s’arrêter, de chuchoter au bord de l’eau, et de tendre l’oreille, comprendront vite que les histoires les plus précieuses de la Haute Sarthe se glissent souvent… juste entre deux rames de saules, au fil du courant.